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L'enseignant marnais risque vingt ans de prison au Tchad

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ÉVÉNEMENT / L'enseignant marnais risque vingt ans de prison au Tchad

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Le Marnais Alain Péligat (sur la photo avec sa casquette noire), accusé « d'enlèvement d'enfants » par le Tchad, est surtout un idéaliste jusqu'au-boutiste, déjà père de trois jeunes Cambodgiens.

IL est apparu sur les écrans, claudiquant, menotté, dans une prison improvisée d'Abéché, à l'est du Tchad, tout près de la frontière soudanaise. Sur son tee-shirt est inscrit « Children rescue », du nom de l'opération controversée d'évacuation de 103 orphelins du Darfour.
Avec sa casquette noire, ses longs cheveux blonds noués en catogan et sa barbe de Gaulois, Alain Péligat, livré en pâture aux caméras, est facilement reconnaissable parmi les dix-sept Européens retenus prisonniers par les autorités tchadiennes.
Alain Péligat s'est déjà longuement battu pour pouvoir adopter trois jeunes Cambodgiens. En 2003, il avait une première fois bouleversé l'ordre établi.

Jusqu'au-boutiste

Alors que le Cambodge venait de fermer ses frontières aux parents adoptants, il avait finalement obtenu une dérogation du ministère des Affaires étrangères et avait pu ramener la jeune Kanya à Mourmelon-le-Grand. Non sans avoir fait pression sur les autorités avec une menace de grève de la faim.
Professeur de « conduite routière », au lycée technique Oehmichen, à Châlons-en-Cham pagne, où sa femme Christine, est conseillère principale d'éducation, Alain Péligat a effectué normalement la rentrée scolaire. Il a ensuite rejoint l'association l'Arche de Zoé comme logisticien, tout en étant vice-président du Collectif des familles pour les orphelins du Darfour (Cofod). Le but déclaré était d'évacuer à terme 1.000 enfants en France, 10.000 dans le monde. « Sa participation a été discutée et décidée en famille, avec nos six enfants », tient à préciser son épouse.
L'engagement d'Alain Péligat au profit du Darfour est connu. Dès 2006, il est parvenu à mobiliser des lycéens et des professeurs pour collecter du matériel au profit de la région soudanaise en guerre.
Malgré les réticences voire les mises en garde du Quai d'Orsay, malgré l'absence d'autorisation du rectorat, son employeur, Alain Péligat, rangers et look de baroudeur, s'est envolé pour la frontière soudano-tchadienne.
Tout comme les cinq autres membres de l'association, « il a fait ce que les autres n'ont pas le courage de faire », selon les mots de Me Gilbert Collard. Un jusqu'au-boutisme qui lui vaut les foudres d'Idriss Déby, le président du Tchad, de l'Etat français et de l'ensemble des ONG. Au point de se voir traiter par le président tchadien de « trafiquant d'enfant », de « marchand d'organes », de « pourvoyeur pour pédophile », sans que la France ne réagisse.
Alain Péligat, l'idéaliste, va-t-il être sacrifié avec ses autres compagnons d'infortune sur l'autel diplomatique ? Christine, son épouse, présente hier à une conférence de presse à Marseille, a exprimé sa « confiance » dans la diplomatie française pour résoudre la situation.

« Sauver des vies »

« Cette opération, menée par des pompiers, des médecins, des enseignants… n'avait pour but que de sauver des vies », répète-t-elle. « Je ne regrette rien. Cela aura au moins le mérite de faire reparler du Darfour. Certes, il y a eu des maladresses mais c'était une première. » Alain Péligat encourt au Tchad vingt ans de prison et les travaux forcés. S'il est rapidement extradé en France, ce que ses proches espèrent, il risque d'être mis en examen pour « exercice illégal d'intermédiaire en vue de l'adoption », un délit puni d'un an de prison et de 15.000 euros d'amende.

Christophe Perrin

2007 Nov 19